la société du Caveau, haut-lieu parisien des chansons à timbre au XVIIIe et XIXe siècle

Après le Théâtre de Foire, nous nous intéressons ici à un autre haut-lieu parisien des chansons à timbre au XVIIIe et XIXe siècle:

la société du Caveau


Lorsque dans les années 1720 , Pierre Gallet (1698-1757), fils d'épicier plus épris de chansons et de théâtre qu'intéressé par le commerce hérité de son père, invitait dans son arrière-boutique ses amis ,Charles Collé (1709-1783), Alexis Piron (1689-1773) et Charles-François Panard dit Pannard (1689-1765), tous piliers du Théâtre de Foire et bons vivants , on vidait force bouteilles, on chantait, on s'amusait et faisaient mille folies.
A partir de la fin de 1729, sous l'impulsion donné par ces fêtes privées qui avaient sérieusement vidé les caisses de Gallet (ses bouteilles et sa fortune ), des rencontres dînatoires furent organisées chaque mois au cabaret de Nicolas Landelle, rue de Buci, dans la salle basse qui portait le nom de « caveau ».
C'est ainsi que fut fondé la première société du Caveau, société épicurienne sous forme de dîners chantants; les convives chantaient leurs œuvres à la fin du repas.
Aux amis du début s'étaient joints : Louis Fuzelier, Prosper Jolyot dit Crébillon père, Claude Jolyot dit Crébillon fils, Sallé, Bernard-Joseph Saurin , Charles Pinot dit Duclos, François-Augustin de Paradis de Moncrif, Pierre-Auguste Bernard dit Gentil-Bernard, Labruère, Jean-Baptiste de La Noue, le musicien Jean-Philippe Rameau, le peintre François Boucher, le philosophe Helvétius...
En 1739, une querelle entre Crébillon père et Crébillon fils mit fin à ces réunions et provoqua la dissolution de cette première société du Caveau.


La société du Caveau fut reconstituée en 1759 par le fermier général Pelletier avec divers membres du premier Caveau comme Crébillon fils, Charles Collé, Gentil-Bernard, Helvétius, La Noue et des nouveaux venus comme Charles-Simon Favart, Antoine Albanèse, François André Danican dit Philidor, Jean-François Marmontel, Jean Baptiste Antoine Suard, Pierre Laujon, le peintre Joseph Vernet et même, à partir de 1767, le futur physicien astronome Pierre Simon Laplace qui avait dix-huit à l'époque. L'esprit de cette société du second Caveau , qui ferma ses portes vers 1769/1770, réussit en partie à persister jusqu'en 1789 sous le nom de « la Dominicale » grâce à l'impulsion du chirurgien Antoine Louis (qui sera le concepteur d'une machine destinée à la décapitation des condamnés présenté par le docteur Joseph Guillotin aux députés de l'Assemblée constituante le 28 novembre 1789).

C'est en décembre 1805 que fut fondée la société du Caveau moderne, par le comédien Armand Gouffé et le libraire Pierre Capelle. Présidée par Pierre Laujon (premier chansonnier élu à l'Académie Française) puis par Marc-Antoine-Madeleine Désaugiers .
Ses autres éminents membres étaient : Pierre Jean de Béranger, Nicolas Brazier, Philippon de La Madelaine, Emmanuel Dupaty, Laurent Grimod de La Reynière, Emmanuel Théaulon, Pierre Antoine de Piis, Victor-Joseph Etienne dit de Jouy, Louis-Claude Cadet de Gassicourt, François-Guillaume Ducray-Duminil.. et Jacques-André Jacquelin (secrétaire général).
Le Caveau moderne ferma ses portes en 1817 en raison de divergences politiques. La société laissa un recueil composé de 11 volumes in-18.
La société fut reconstituée puis éclatée dix fois, les lieux de réunions étant chaque fois différents, mais avec toujours la volonté de se rattacher à l'esprit de tradition du Caveau moderne. Un volume in-18 des œuvres de la Société fut publié chaque année de son existence.

Qualifié parfois d'Académie, ces sociétés épicuriennes ont permis que la chanson parvienne à son épanouissement et ont préparé les évolutions postérieures: café-concert et music-hall , cabarets artistiques pour la chanson littéraire...

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